— Déshabille-toi.
Florian dut cligner des yeux pour essayer de garder même un minimum ses esprits. Déjà ? Là ?
— Hein ? lâcha-t-il.
— Si je te dis…
Juan sembla réfléchir.
— … « Je veux que tu me défonces si fort que j’en hurlerai à réveiller tout l’immeuble », c’est quoi ?
OK… Juan jouait encore ou… bossait… ou… Et, putain, ils étaient au travail, là.
Confus, il leva les yeux vers la pendule et se rendit compte qu’ils avaient dépassé l’heure du départ. Plus personne ne devait se trouver dans les bureaux ou plus pour longtemps. Mais il fut incapable de pousser plus loin sa réflexion. Comment diable Juan faisait-il pour poursuivre sur cette histoire de classification quand ils auraient pu se sauter dessus sans autre préambule ?
— Le fait que toi et moi, nous soyons habillés, le relança Juan, ça joue, n’est-ce pas ? Ça nous place forcément dans l’érotique.
— Oui, admit Florian.
— Si je te dis la même chose, nu, tu le percevras différemment.
Ce n’était pas vraiment une question. Mais il connaissait la réponse. Il la désirait même.
— Oui.
Juan fit alors tomber son pantalon et s’occupa d’enlever ses vêtements de ses chevilles avant de l’inviter d’un mouvement de tête à en faire autant. Florian resta coi. Il avait une trique à servir de bélier pour enfoncer une porte et son cœur battait tellement vite que c’était comme s’il allait finir par s’arrêter. Et pourtant, il était incapable de bouger et d’attaquer sa mise à nu, ses yeux suivant chaque geste de Juan, chaque contraction de muscle avant de se poser sur la bosse proéminente qui déformait son boxer. Juan le fixa avant de sourire et de baisser son dernier vêtement.
Quand il se retrouva entièrement dénudé devant lui, Florian le dégusta du regard, détaillant son sexe tendu, le halo de poils noirs qui l’entourait, celui qui recouvrait ses jambes. La combustion spontanée le menaçait, il en était certain.
— Alors, si je te répète que « Je veux que tu me défonces si fort que j’en hurlerai à réveiller tout l’immeuble », cette fois ?
Il inspira pour reprendre un tout petit peu contenance et ne pas simplement dire : « Oui, tout ce que tu veux, l’immeuble et la ville entière tant qu’on y est ».
— Érotique, choisit-il pourtant.
Et franchement ? Il méritait une médaille pour son self-control. Méritait qu’on lui érige une statue : Florian, l’homme qui, non content de se taper du porno à longueur de journée sans sourciller, fut capable de rester stoïque face à son sex-symbol de patron alors qu’il lui suggérait, à poil, l’idée de le baiser de toutes ses forces…
— Bien, donc, ce n’est pas tant ce que je dis que mes actions, alors ?
Qu’allait faire Juan quand il répondrait oui ? Parce qu’il allait répondre oui, c’était évident. C’était la vérité d’ailleurs, mais surtout, surtout…
— Oui.
Juan se rapprocha de lui et posa soudainement les mains sur ses hanches. Le contact de sa peau sur celle sous son t-shirt l’électrisa et il le laissa le lui ôter avec envie. Quand son patron s’attaqua aux boutons de son jean, il ne protesta pas davantage, devant plutôt lutter pour se retenir de se jeter sur lui que pour lui résister. Mais il était nu, là, devant lui et toute résistance était futile. Cela faisait un moment qu’il avait perdu, de toute façon.
Lorsqu’il fut dénudé lui aussi, le sexe plus dur que jamais et Juan tout aussi raide, il eut vraiment le sentiment d’être en train de rêver et bon Dieu il ne voulait surtout pas se réveiller, jamais.
Puis Juan le fit reculer de manière à l’appuyer contre le bord du bureau et tomba brusquement à ses genoux. Lorsqu’il leva ensuite les yeux pour le regarder, Florian aurait pu en jouir sur l’instant.
— Et là ? lui demanda son patron.
Porno ! pensa Florian, et ce avec la plus grande force qui soit et sans la moindre hésitation, mais il dit quand même de la voix la plus assurée qu’il put :
— Érotique.
Juste pour voir ce que ferait Juan par la suite.
Celui-ci ne fut pas dupe, car son sourire eut ce petit quelque chose d’amusé qu’il lui avait déjà vu.
— Tu es vraiment sûr ?
— Oui.
#Menteur.
— D’accord.
Alors, Juan prit une profonde inspiration et, tout doucement, il souffla sur sa verge de haut en bas. Le frisson que Florian en éprouva le parcourut des pieds à la tête avant de faire le chemin inverse. Et si ce n’était pas la caresse la plus érotique qu’on lui ait jamais prodiguée, il ne savait pas ce que c’était. Il ne sut même pas pourquoi il ne projeta pas les reins vers l’avant pour venir à sa rencontre et… il se concentra sur sa posture… OK, il venait de le faire, en fait. Quand Juan reprit une nouvelle inspiration, son ventre se contracta de plaisir anticipé. Le second passage de son souffle fut tout aussi délicieux que le premier.
— Érotique, énonça-t-il sans que Juan n’ait besoin de dire quoi que ce soit.
Cela fit sourire ce dernier.
Avec un regard plus brûlant que jamais, Juan amena ses doigts à sa bouche et entreprit de les lécher. Voir sa langue naviguer malicieusement à quelques centimètres de sa verge qui n’attendait que cela était la pire des tortures. Et en même temps, son excitation et son envie grimpaient de plus en plus haut, de plus en plus vite et c’était délicieux, atrocement délicieux.
Et puis les doigts humides se posèrent sur sa verge, glissant avec facilité le long de sa chair. Il gémit.
— Pornographique ? demanda Juan.
— Ça dépend…
Sa réponse sembla décontenancer Juan, et si le plaisir ne l’avait pas en partie étourdi, il aurait apprécié que la situation s’inverse enfin un peu.
— Ça dépend de ce que filme la caméra, continua-t-il.
Les va-et-vient sur son sexe se poursuivaient. Que ça dure encore, surtout…
— Si elle filme ton visage et la façon dont tu te mords la lèvre ? demanda Juan.
Qu’il ait décrit ainsi l’expression qu’il devait avoir le perturba, mais il répondit quand même :
— Érotique.
— Si elle descend sur ton torse et ta main crispée dessus ?
— Érotique.
— Si elle se recule pour nous englober, toi et moi à tes pieds ?
— Érotique.
— Si elle vient sur ma main qui te caresse ?
— Pornographique.
— Sur mon visage qui s’approche de toi ?
— Érotique.
— Ma langue qui suit ta verge ?
Alors qu’il le faisait pour de bon, Florian se trouva incapable de répliquer, sa gorge laissant juste passer un long halètement.
— Porno, parvint-il enfin à dire alors que la langue de Juan se détachait de sa chair.
Ce dernier leva les yeux vers lui pour le fixer durant quelques secondes.
— Sur ma bouche qui embrasse ton gland ?
Juan ne bougea pas. Florian prit quelques secondes pour répondre, frémissant à l’idée que Juan mette en pratique cette dernière suggestion :
— Porno.
Et Juan engloba son sexe de ses lèvres.
Dans un gémissement, Florian glissa les mains dans la chevelure de Juan, les y crispant. Sa bouche le rendait fou et le savoir, là, agenouillé devant lui en train de le sucer comme s’il s’en était privé durant des années, avait un quelque chose d’autant excitant qu’irréaliste. Il caressa sa tête, sa joue, frémissant alors que Juan le prenait plus profondément. Si ses allers-retours étaient lents, Florian pouvait les sentir avides, accompagnés de longs mouvements de langue et de succions si délectables qu’il en ferma les yeux… un instant seulement. Il était hors de question qu’il se prive du spectacle s’offrant à lui. En observant la bouche ouverte autour de son sexe, il n’eut aucune hésitation sur le caractère pornographique de ce qu’il voyait, mais il aurait pu regarder ce film-là pendant des heures sans se lasser. Les mains qui vinrent caresser ses testicules le laissèrent de marbre, mais il prenait bien assez de plaisir par les attentions buccales pour signifier son manque de sensibilité à cet endroit. Juan laissa finalement ressortir sa verge et embrassa son bas-ventre, avant de poursuivre sur son estomac.
— Érotique ? demanda-t-il.
— Putain, oui, souffla Florian.
Juan remonta légèrement pour atteindre son plexus solaire avant de continuer jusqu’à ses pectoraux. Sa langue y navigua par petites circonvolutions jusqu’à trouver le pic qu’elle recherchait. Florian s’agrippa plus fort à lui quand Juan aspira son téton entre ses lèvres.
— Érotique, souffla-t-il encore.
Il savoura la caresse, frissonna quand Juan le relâcha et que la pointe humide se raidit au contact de l’air frais. Mais Juan était déjà sur l’autre, et il se laissa emporter au rythme de ses succions et coups de langue. Les lèvres poursuivirent finalement le long de son cou.
Ses mains posées sagement sur les hanches de Juan le tirèrent à lui, collant leurs deux corps et alignant leurs verges. Et tandis qu’il ondulait très légèrement du bassin, le visage de Juan lui fit face.
— Érotique, répondit-il machinalement.
Excitant, enivrant, torride lui vinrent aussi à l’esprit.
— Et le fait que nous ne nous soyons pas encore embrassés ?
— Frustrant.
Et il ne chercha pas plus longtemps, il agrippa Juan, se pencha et l’embrassa à pleine bouche. Sa langue eut vite fait de se frayer un chemin entre les lèvres collées aux siennes. Prendre son temps n’était plus vraiment de circonstance. Il aurait adoré être patient et déguster ce baiser avec retenue, mais cela lui était impossible, et toute son envie, son excitation, il les y déversa, dévorant la bouche qui s’offrait à lui.
Juan, maître du jeu depuis le départ, lui cédait le pouvoir. Et il ne le faisait pas seulement dans ce baiser et la façon dont il penchait la tête pour lui fournir toute la latitude qu’il désirait. C’était visible aussi dans la façon subtile dont son corps se faisait plus souple contre le sien, plus soumis aussi. Florian voulait saisir l’invitation. Ses mains n’hésitèrent plus et il se mit à lui caresser le dos ainsi que les fesses offertes. Le baiser se poursuivit, vorace et exigeant et bientôt l’envie de plus, de plus de chair, de plus de contacts devint incontrôlable, au point où son corps se mettait déjà en mouvement, mime de l’acte qu’il rêvait de pratiquer. Il fallait qu’il passe à la suite, là, maintenant, tout de suite et…
— On n’a pas de préservatifs, réalisa-t-il, complètement catastrophé.
Juan laissa échapper un petit rire avant de se reculer. Il s’approcha de la porte et pendant un instant, Florian pensa qu’il allait sortir comme ça, nu et en érection et ç’aurait été encore plus délirant que ce qu’il avait vécu jusque-là, mais il la verrouilla et la prise de conscience le frappa de plein fouet. N’importe qui aurait pu pénétrer dans la pièce et les surprendre, bien qu’il ignore s’ils étaient ou non les derniers présents dans les lieux. Déjà, Juan se dirigeait vers son pantalon et lorsqu’il le vit se pencher pour l’attraper, la vision fut suffisante pour lui faire oublier cet instant d’inquiétude.
Il se décala pour mieux l’apprécier et eut un petit sourire en lui lançant :
— Pornographique.
— Et où donc est braquée la caméra ? s’amusa Juan.
Florian n’y tint plus et s’approcha. Juan ne fit pas un mouvement, offrant à son regard l’impudeur de son intimité dévoilée.
— Là, souffla Florian alors que d’un geste il passait entre les fesses légèrement écartées de Juan, effleurant l’entrée qu’il convoitait pour descendre jusqu’à ses testicules.
Il le voulait tellement ! Enhardis, ses doigts poursuivirent jusqu’au sexe tendu de son partenaire et s’enroulèrent autour de lui. La caresse qui suivit lui valut le plus beau des gémissements et il se sentit désormais prêt à tout, et en particulier à faire tout ce que Juan avait demandé à titre d’exemple plus tôt : le baiser fort, tellement fort que l’immeuble, la ville, le pays entier l’entendrait jouir sous ses coups de reins.
Il se pencha et ses lèvres effleurèrent la peau de sa nuque, poussant Juan à chercher en urgence un appui, qu’il trouva sur le rebord du bureau. Alors, il grignota sa chair, la lécha, la mordit au besoin tandis que sa main poursuivait son œuvre. Contre lui, Juan se frottait lascivement, relâchant par moments des soupirs si chauds qu’ils finissaient de l’achever. Il accéléra ses caresses jusqu’à ce que Juan l’interrompe et lui tende, le souffle court, le lubrifiant et le préservatif qu’il avait extraits de son pantalon. Aussitôt, Florian les attrapa et se recula. Il ouvrit le paquet et plaça la protection sur son sexe alors que Juan le surprenait en se redressant pour en faire tout autant.
— On ne voudrait pas laisser des traces derrière nous, précisa-t-il.
— Tu penses à tout, chuchota Florian et même lui put sentir à quel point son souffle se faisait désormais empressé.
Juan lui sourit, se retourna puis, d’un léger bond, grimpa sur le bureau. Lorsqu’il écarta les jambes dans une position offerte, Florian fut fasciné par la vision qui s’offrait à lui.
— Érotique, commenta-t-il, même si ça pouvait sembler surprenant.
Mais il n’y avait rien de pornographique pour lui à cet instant. Juan, nu, en érection, simplement éclairé par la lumière de rue, maintenant que l’obscurité de la nuit hivernale était tombée… L’image était magnifique.
— Tu as toujours du mal à faire la différence entre les deux, se moqua Juan.
Florian sourit, amusé.
— Sûr…
Et il se pencha sur lui pour baiser de nouveau sa bouche, la capturer et la faire sienne. Et l’intensité avec laquelle il se fondit dans ce contact reflétait celle avec laquelle il désirait désormais prendre Juan. Puis il redressa légèrement la tête et plongea dans son regard.
— À toi de décider si la suite sera érotique ou bien porno, souffla-t-il.
Un coin des lèvres de Juan se releva.
— Celle des deux que tu voudras, dit-il.
Florian voulait tout.
La respiration accélérée par l’excitation, il se redressa et considéra l’entrée où il mourait d’envie de s’enfoncer.
Voir son sexe à l’orée du corps tant désiré était clairement porno, mais du porno comme ça, il en voudrait tous les jours. Il se pressa contre sa chair et se mordit les lèvres en regardant sa verge entrer, progresser dans cet antre chaud et serré et… il finit par fermer les paupières et renverser la tête de plaisir tandis qu’il finissait d’y glisser. Durant quelques secondes, il resta ainsi, mais eut besoin de voir Juan et rouvrit ses yeux humides sur lui. La tête tournée de côté et la respiration rapide, ce qu’il éprouvait semblait si intense que Florian se demanda s’il avait eu raison de le pénétrer si vite, sans même chercher à le préparer. Il ne savait pas, après tout, si Juan était habitué à ça ou si…
Mais celui-ci ouvrit un œil légèrement railleur.
— Alors ? Tu n’étais pas censé me faire crier ?
Oh, bon Dieu, si !
Il se recula, et ce fut comme si toute sa chair pleurait d’excitation et de besoin à la fois, avant qu’enfin, il rentre de nouveau l’enfouir dans le corps de Juan, et c’était érotique, et c’était pornographique, et c’était surtout fou, chaud, brûlant et bon à en perdre la tête. Sans plus hésiter, il pratiqua de longs va-et-vient en lui, toujours faiblement conscient, au fond de lui, de ce qu’il y avait de transgressif à prendre ainsi celui qui restait son patron : l’homme sur lequel il avait fantasmé des mois durant, celui avec qui il s’était promis de toujours garder ses distances, celui qu’il avait vu tant de fois prendre la place des acteurs devant ses yeux… Il s’abîma dans le plaisir de le posséder, de sentir son sexe entrer en lui et ressortir lentement, et engendrer ainsi des frictions si agréables qu’il en était pantelant.
Devant lui, Juan se tordait, son torse se soulevait et se rabaissait au gré de son souffle, son corps accueillant avec une envie palpable ses coups de reins. Sans réfléchir, Florian se mit à aller et venir plus fortement en lui. Juan gémit. Il lui avait promis de le faire crier fort et il voulait tenir sa parole. Il changea d’angle, chercha à frotter plus intensément sur sa prostate, recueillit quelques halètements et frissons plus marqués qui majorèrent encore son excitation. De doux frémissements de plaisir commencèrent à serpenter aux creux de ses aines, le long de son dos, montant… Et quand Juan se mit à se masturber, Florian resserra ses mains sur ses cuisses et se laissa aller à le marteler sans plus se retenir, lui arrachant des cris d’extase qui firent écho aux siens quand sa voix se libéra aussi. La jouissance monta, puissante, et il y sombra avec force, se déversant tandis que des éclairs de plaisir crépitaient jusqu’à l’intérieur de son crâne.
Enfin, il s’arrêta, assailli par une nuée inattendue d’images : de celles que les heures de visionnage de vidéos pornographiques avaient inscrites dans son esprit et sur lesquelles se superposaient celles que son amant venait de lui offrir. Il voulait plus de Juan, plus de son corps, plus de son souffle, plus de la sensation de sa chair et du son de sa voix dans le plaisir… Difficilement, il essaya de reprendre sa respiration. Il s’était tellement laissé emporter par le fait d’être en lui qu’il n’avait même pas essayé de l’attendre avant de jouir. Pas grave, il ne comptait pas s’arrêter là, de toute façon.
Après une dernière longue expiration, il se retira. Lorsqu’il leva les yeux sur Juan, il remarqua que ce dernier le dévisageait avec une lueur perverse dans le regard.
— Je pense qu’on peut faire encore plus porno…
Florian rit légèrement à la remarque de Juan, puis s’attarda à retirer sa protection.
— On est toujours en train de faire de la simulation pour le travail ? demanda-t-il d’un ton badin.
— Peut-être…
Celui de Juan était clairement joueur. Florian lui lança une œillade provocante.
— Tu n’as pas crié assez fort ?
— Non… Toi, tu n’as pas assez crié.
Le sourire en coin avec lequel Juan lui avait dit ça lui plut particulièrement. Tandis qu’il se dirigeait vers la poubelle pour jeter son préservatif, il put entendre son amant redescendre du bureau. Il se penchait à peine au-dessus de la corbeille qu’il sentit déjà son torse chaud se coller à son dos.
L’excitation regrimpa en lui, nullement entravée par son récent orgasme. Son sexe ne se releva pas pour autant aussi vite. Florian se redressa, accueillit les baisers de Juan dans son cou, se laissa étourdir.
— Encore, réclama celui-ci.
Le mot le plus chaud du monde…
Si la manière dont Juan caressa juste après l’espace entre ses fesses le surprit, celle dont il appuya ensuite sur l’entrée de son corps déclencha en lui une brusque montée de désir. Il posa une main sur le mur attenant à la corbeille, avant d’y appliquer l’autre en soufflant quand le doigt qui l’attisait plongea en lui. Il sentit sa verge réagir légèrement comme son amant touchait le point qu’il savait être le plus sensible de son corps. Putain, il en voulait encore…
Un murmure de plaisir lui échappa et il se cambra pour s’offrir plus intensément à ses caresses, laissant retomber la tête vers le bas. La manière dont Juan gémit alors d’envie en espagnol l’excita vivement.
Quand ce dernier enfonça un second doigt en lui, il se mordit les lèvres tandis que son amant continuait à le pénétrer de ses phalanges en veillant à chaque fois à bien appuyer sur sa prostate. Il se tordit sous les pressions insistantes, dévasté par le plaisir montant, et il se mit même à caresser par réflexe sa verge qu’il sentit si tendue soudain, et le fit si vivement qu’il aurait pu jouir ainsi, mais Juan l’arrêta d’une main ferme sur son poignet. Il cessa alors ses mouvements, mais son amant ne retira pas ses doigts, jouant encore avec sa boule de nerfs, faisant remonter des éclairs de pure extase dans tout son corps. Il en lâcha de longues expirations qui ne parvenaient que difficilement à modérer son besoin de gémir.
Juan finit par s’arrêter.
Sa bouche fut près de son oreille, son souffle brûlant.
— Tu as toujours envie de porno ? demanda-t-il enfin.
Florian n’attendait que ça.
— Oui, répondit-il sans hésitation.
Juan lui lécha l’oreille, provoquant des frissons tout le long de sa nuque.
— Tu veux bien écarter plus les jambes ?
Florian s’exécuta avec envie.
— Tu veux que je t’encule ? poursuivit Juan.
Le choix de vocabulaire le fit rire. Il tourna le visage pour découvrir l’expression amusée de son amant.
— OK, ça, c’est porno, acquiesça-t-il.
Juan sourit.
— Non, ça, ça l’est.
Et il s’enfonça lentement en lui.
Florian gémit fortement, conscient de la présence qui l’emplissait. Il pencha la tête, tremblant de savoir quel serait l’acte suivant de Juan. S’il continuerait à être doux ou s’il se mettrait à aller et venir vivement en lui.
Mais Juan ne bougea pas. Il resta simplement ainsi, à appuyer son sexe contre sa prostate déjà fortement stimulée, et à caresser longuement son dos et ses hanches. Puis, très progressivement, il recula, et Florian retint son souffle. Et quand son amant revint s’enfoncer en lui, il relâcha un râle de plaisir. Cette douceur, cette tendresse était agréable et remuait quelque chose en lui, mais pour l’heure, son excitation réclamait plus. Il dut se contenir pour ne pas faire lui-même des allées et venues sur la chair qui l’enflammait. Comme Juan s’immobilisa de nouveau, il tourna légèrement la tête vers lui et lui adressa un regard provocateur.
— Je suis sûr qu’on peut faire encore mieux, l’incita-t-il dans un sourire.
— Tu veux que je te baise plus fort ?
Putain, pourquoi les pornos étaient-ils toujours si ennuyeux quand, dans la vraie vie, de simples mots, une simple invitation, un geste pouvaient porter une telle tension en eux ? Il hocha vivement la tête. Juan ne se fit pas prier. Il serra aussitôt ses doigts sur ses hanches et accéléra son rythme. Grand Dieu, que c’était bon ! Il en avait eu besoin, en fait. Depuis combien de temps n’avait-il plus éprouvé cette sensation ? Et que ce soit Juan qui en soit à l’origine, lui qui avait accueilli sa propre verge quelques minutes seulement auparavant, rendait l’acte encore plus extraordinaire et excitant.
Il se cala contre le mur et accueillit les coups de reins avec un plaisir grandissant, savourant les mains qui enserraient ses hanches.
C’était bon, terriblement bon, il en voulait encore.
— Plus, gémit-il.
Et Juan accéléra, le pilonnant littéralement. Le plaisir crépita dans son corps, s’enflammant à chaque nouvelle pénétration. Mais ce n’était pas encore assez et il ne comprenait pas pourquoi ni comment, il savait juste qu’il voulait plus. Alors dans un mouvement qui ne fut pas sans douleur pour lui, il repoussa son amant, le forçant à sortir brutalement de son corps. D’un regard rapide, il engloba la scène : le visage surpris, frustré et même un peu hagard de Juan… plus loin, son fauteuil, toujours pas. Restait le sol…
— Parfait.
Alors il prit la bouche de son amant avec la même passion que précédemment et peut-être davantage de folie. L’exclamation de Juan fut étouffée sous ses lèvres, tandis qu’il le poussait fermement jusqu’à l’allonger sur le parquet.
— Flo…
Mais l’heure n’était pas aux paroles. Il l’enjamba pour se positionner au-dessus de lui avant de s’empaler violemment sur son sexe tendu. Juan laissa échapper un râle sonore. Florian ne lui laissa pas le temps de réfléchir. Lui-même n’en était plus capable. Il voulait juste voir Juan jouir. Alors il se mit à bouger vigoureusement, ses mains caressant, touchant, griffant, tandis que ses lèvres et sa langue faisaient des ravages sur le visage de Juan qui tentait de lui rendre baiser pour baiser, caresse pour caresse, mais qui semblait pourtant dépassé par sa fougue. Le plaisir grondait en lui avec tumulte, ses jambes devenaient douloureuses tant il s’échinait sur l’homme qui se décomposait sous ses assauts, mais il n’aurait rien changé. Il en aurait été incapable. Le regard fixé sur le visage de Juan, il attendait le moment où il chuterait, où ses onomatopées ne seraient plus le signe de sa montée, mais celui où il atteindrait son apogée.
Et puis, enfin, Juan jouit. Son corps se raidit sous le sien tandis que de longs râles lui échappaient encore et encore et qu’il laissait partir son crâne en arrière, le faisant rouler sur le sol. Absorbé par ce spectacle, Florian n’en enserra pas moins la verge à l’intérieur de son corps par une forte contraction avant d’empoigner son sexe et se masturber rapidement et sans aucune retenue. La présence du sexe en lui, la manière dont il le sentait pulser, l’expression de Juan dans la jouissance… Tout le poussa vers un nouvel orgasme qui l’emporta tandis qu’il se répandait sur le torse de son amant. Le plaisir fulgurant l’envahit entièrement, emplissant son cerveau, annihilant complètement les paroles précédentes de Juan sur la nécessité de ne pas laisser de traces de leurs ébats… Mais sur le coup, il s’en moquait. Ils se nettoieraient plus tard. Son corps se fit terriblement mou et il s’effondra sur lui.
Leurs deux poitrines collées gonflaient et se vidaient à un rythme rapide tandis que leurs souffles ne semblaient plus vouloir revenir à la normale. L’odeur de sperme, de sexe, de sueur qui assaillait les sens de Florian finissait de l’étourdir. Comment allait-il faire pour se relever après ça ? La question méritait d’être posée.
#MissionImpossible.
Mais pour l’heure, les mains de Juan, qu’il avait craint de sentir le repousser, caressaient son dos avec tendresse et c’était très bien ainsi.
— C’était définitivement pornographique, remarqua finalement Juan.
Et Florian éclata de rire parce qu’il ne s’y attendait pas et parce qu’il aimait ça, les gens qui ne perdaient pas le nord.
— Je crois qu’on peut dire ça.
— Est-ce qu’au moins ça t’a aidé ?
Juan avait l’air amusé et même légèrement taquin en disant ça. Florian se redressa afin de lui faire face. Il se força à considérer sa question.
En un sens oui, s’il restait sur la conception érotique/porno dont ils avaient parlé auparavant, ce qui venait de se passer entre eux lui faisait réaliser que c’était plus le contexte et les actions qui jouaient que le vocabulaire. Pour le reste… Son regard se balada sur le visage de Juan qu’il trouva encore plus attirant qu’avant leur étreinte, si seulement c’était possible. En fait, la véritable question qui le turlupinait était : « et maintenant ? ».
Que se passerait-il désormais entre eux ? En resteraient-ils à un coup d’un soir ou pouvait-il espérer plus ? Et comment allait-il gérer le fait de bosser ensemble en sachant à quel point le sexe pouvait être bon avec lui ?
Et peut-être plus que tout, Juan, que voulait-il ?
D’une petite mimique, ce dernier le relança. Il n’y avait sans doute qu’une seule façon de répondre à toutes ces questions.
— Je crois qu’il me faudrait approfondir le sujet, tenta-t-il, le cœur battant.
Le sourire de Juan se fit resplendissant. Il se redressa jusqu’à venir l’embrasser tendrement.
— Eh bien, je te propose qu’on se rhabille, qu’on range un peu, qu’on aère.
La remarque le fit pouffer.
— Et après une douche et un repas à la maison, nous aurons tout le reste de la soirée pour étudier cela. Qu’est-ce que tu en dis ?
Il acquiesça d’un mouvement de tête avant de se relever doucement et de se reculer. Le sol lui avait fait un peu mal aux genoux, mais il tenait sur ses jambes, c’était toujours ça de pris. Juan en fit autant et, d’un geste mécanique, enleva le préservatif. Avec son ventre portant les traces de leurs ébats, ses cheveux en bataille, ses lèvres rougies et son sexe pas tout à fait au repos, il était plus sexy que jamais et tandis qu’il attrapait ses vêtements, Florian ne put s’empêcher d’espérer qu’il y aurait plus que ce soir.
Quand ils se furent rhabillés, qu’ils eurent récupéré les deux préservatifs usagés (Florian aurait pu bénir Juan d’y avoir pensé), ils prirent le chemin des ascenseurs. Les bureaux étaient vides et plongés dans le noir. Alors qu’ils marchaient en silence, Florian chercha un moyen de tâter le terrain auprès de Juan pour savoir s’il attendait bien plus que cet interlude, mais ne le trouva pas.
Une fois arrivé dans le parking, Juan sortit ses clefs de voiture et lui demanda avec un sourire séducteur :
— Prêt pour une longue soirée de travail ?
Une façon comme une autre de lui permettre de faire machine arrière sans doute, quand tout ce qu’il voulait c’était au contraire avancer, avancer même très loin et très vite. Peut-être était-ce le moment idéal pour amener la discussion sur le sujet.
— Je…
Il ne savait pas comment s’y prendre. Il repensa à son job et à la manière dont son pétage de plombs les avait emmenés là.
— Tu sais, pour le boulot… je…, même si je suis content de la tournure qu’ont pris les choses ce soir, je ne sais pas si je pourrai rester à ce poste encore longtemps, lâcha-t-il soudainement, inquiet de ce qu’en dirait Juan.
Peut-être que sa proposition ne survivrait pas à cette demande de sa part.
Juan n’eut pourtant qu’un petit sourire en coin, montrant clairement qu’il s’était attendu à entendre ça un jour ou l’autre.
— Alors il faut qu’on se dépêche d’explorer toutes les facettes du porno et de l’érotisme ensemble avant, répondit-il avec une expression mutine.
Florian ne demandait que ça. Son ventre se tordit d’envie et d’anticipation. Il sauta néanmoins sur l’occasion :
— Oui… mais tu sais, j’aurai sûrement besoin de cours de rappel, je peux être long à la détente, parfois…
Juan sourit largement.
— J’ai remarqué ça.
— Comment ça ? réagit Florian en fronçant les sourcils.
Cette fois, Juan éclata franchement de rire.
— Disons que tous les moyens discrets et subtils que j’ai tentés pour te montrer que tu me plaisais ont fait chou blanc alors même que tu me dévorais des yeux à chaque fois qu’on se croisait. Très honnêtement, si je n’avais pas saisi l’occasion ce soir, je crois que le seul moyen de te coller dans mon lit aurait été de me balader avec une pancarte indiquant : « Florian, baise-moi ».
— Non, mais, mais… euh…
#LeRetourDuEuh.
Juan ricana.
— Il faudra aussi que nous nous penchions sur tes capacités d’élocution, tu as des progrès à faire à ce sujet.
Il en resta muet. Mais déjà Juan lui ouvrait la portière, et s’il hésitait entre rire à son tour et lui rabattre son caquet, il se dit qu’il aurait bien des moyens de le faire taire un peu plus tard… ou du moins d’occuper suffisamment sa bouche à autre chose qu’à le critiquer.