Honorer les vivants

Autrice : Magena Suret.

Genres : Érotique, M/F, hot.

Résumé : Un enterrement, une amie venue en support, un soutien pas si catholique…

Note : Première variation d’une courte nouvelle écrite en 2014 et publiée à l’occasion du Ray’s Day 2016.

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Première variationDeuxième variation

Honorer les vivants

La main sur la poignée, Astrid attendait que Justine termine de se préparer. En temps normal, elle aurait déjà râlé après son amie et colocataire parce qu’elle les mettait en retard à chercher un paquet de kleenex ; cependant, elle conduisait Justine à l’enterrement de son père et les convenances voulaient qu’Astrid se montre plus compréhensive qu’à son habitude.

D’ailleurs, elle avait hésité à accompagner Justine. Après tout, Astrid ne connaissait personne de sa famille. Depuis cinq ans qu’elles partageaient cet appartement, aucun des proches ne leur avait rendu visite, contrairement aux parents d’Astrid qui ne supportaient pas de ne pas la voir pendant plus d’un mois. Justine elle-même n’avait jamais l’air pressé de se joindre aux événements familiaux, aussi Astrid en avait-elle conclu qu’ils étaient en froid. Pourtant, quelques jours auparavant, elle avait trouvé Justine effondrée et inconsolable. À force de la cajoler, Astrid avait fini par apprendre la nouvelle et avait compris que les relations qui unissaient son amie à sa famille étaient certainement bien plus complexes qu’elle ne l’avait imaginé.

La route jusqu’à l’église se fit dans le silence, ce qu’Astrid regretta. Elle aurait préféré que Justine le comble en lui parlant de ses proches. Du peu qu’Astrid en savait, son amie avait deux frères, mais elle ignorait jusqu’à leurs prénoms. Alors qu’elle s’apprêtait à les rencontrer dans les pires circonstances qui soient, Astrid se rendait compte combien Justine avait été secrète sur son passé quand elle-même avait dû lui raconter sa vie en long et en large.

Le parking était déjà bien encombré quand elles arrivèrent. Astrid était concentrée à trouver une place libre, toutefois elle aperçut le petit signe de main que fit Justine à un groupe sur le parvis. Du coup d’œil qu’elle leur accorda, Astrid ne distingua pas leurs traits, mais elle supposa qu’il s’agissait de la mère de son amie, entourée par ses deux fils. Sitôt la voiture garée, Astrid en descendit et lissa sa jupe. Puis elle patienta quelques instants avant de faire le tour et d’aller ouvrir la portière à Justine. Cette dernière était pétrifiée sur son siège et Astrid retint avec peine un soupir d’exaspération. Elle prit la main de son amie et la força à sortir :

― Si tu n’avais pas envie d’assister à l’enterrement, tu aurais pu venir te recueillir plus tard. Alors, sauf si tu comptes cracher sur la tombe de ton père, je suis sûre que ta famille compte sur ta présence.

— T’es une garce, lui lança Justine d’une voix douce.

― C’est pour ton bien, lui assura Astrid. Et ce n’est pas nouveau.

Les yeux rouges et un léger sourire sur les lèvres, Justine se décida à la suivre docilement. De nombreuses personnes les interceptèrent avant même qu’elles n’atteignent le parvis de l’église. Des amis de la famille, d’anciens collègues, de vagues connaissances… Tous avaient un mot gentil pour Justine et celle-ci les remerciait de façon automatique. À mesure qu’elles approchaient de la famille en deuil, Astrid remarqua que la mère et les frères de son amie n’avaient d’yeux que pour elles deux. Ou plutôt que l’un des hommes semblait la jauger du regard quand l’attention des deux autres personnes se tournait naturellement vers Justine. Astrid aurait pu se sentir vexée d’être considérée de manière aussi méfiante, mais elle reconnaissait une autre étincelle dans ce regard. Et Astrid se doutait que le jeune homme devait se sentir coupable d’éprouver une telle bouffée de désir alors qu’il aurait dû se désoler de la perte de son père. Pourtant, Astrid ne le blâmait pas : le chagrin avait bien des moyens de s’exprimer et se défouler en baisant une inconnue était certainement très libérateur. D’autant que, dans une autre situation, Astrid aurait été la première à dégainer ses atouts pour séduire le jeune homme. Ce dernier était tout à fait à son goût. Les mèches un peu longues tombant devant les yeux étaient l’un de ses points faibles : elle en avait déjà les doigts qui la démangeaient pour dégager ce front. Arrivées à leur hauteur, Justine se retrouva prise dans les bras tour à tour de ses frères puis de sa mère. Son amie eut le temps de présenter Astrid à sa famille, mais pas l’inverse, avant que la veuve n’entraîne sa fille à l’écart.

― Puisque notre mère n’a pas laissé le temps à Justine, commença le plus âgé des deux frères, je crois qu’on va se présenter nous-mêmes. Je suis David, l’aîné. Et voici Benoît, le petit dernier.

Astrid serra la main des deux hommes, s’attardant davantage dans celle de Benoît pour en savourer la callosité. À défaut de pouvoir jouer de ses charmes, elle lança la conversation pour assouvir sa curiosité :

― Justine est plutôt secrète sur sa famille. J’avais un peu peur qu’on ne soit pas les bienvenues, aujourd’hui.

Les deux frères échangèrent un regard entendu, puis David s’excusa :

― Je laisse Benoît s’occuper de vous, je vais me rendre utile pour régler les derniers détails de la cérémonie. Je vous reverrai plus tard.

Astrid acquiesça et ressentit une pointe d’excitation à se retrouver seule avec le jeune homme qui l’intéressait. Celui-ci ne se laissa pas déstabiliser par le manque de subtilité de son aîné et enchaîna :

― Il n’y a pas de secret horrible sur notre famille. Mon père était du genre têtu et on peut dire que Justine tient de lui. Si ma sœur a toujours fait la difficile pour venir nous voir, c’est qu’elle ne supportait pas qu’il remette en question le moindre de ses choix. Comme chaque fois, ça se terminait en dispute si on n’était qu’entre nous, notre mère n’a fini par les laisser ensemble dans la même pièce que lors de réunions familiales.

― Mince, s’amusa Astrid. Et moi qui m’attendais à des ragots croustillants.

Sa remarque lui valut un sourire en coin et lui dévoila une fossette adorable. Durant leur conversation, Benoît se rapprocha d’elle. Lorsque David repassa pour faire entrer tout le monde dans l’église, Astrid frôlait le bras de Benoît à chaque mouvement.

Elle retrouva Justine aussitôt après avoir franchi les portes. Son amie l’accompagna jusqu’à la première rangée, où Astrid s’installa en compagnie de la famille du défunt.

Bientôt la messe fut terminée. La veuve, ainsi que ses enfants, se placèrent de part et d’autre du cercueil afin de recevoir les condoléances de chacun. Restée sur le banc jusqu’au passage de la dernière personne, Astrid n’avait pas lâché Benoît du regard. Ce dernier croisait le sien dès qu’il le pouvait. Puis vint le tour d’Astrid de passer devant les endeuillés. La mère de Justine et David acceptèrent sa poignée de main. Benoît quant à lui l’enlaça un court instant, posant une main un peu trop bas sur ses reins pour que ce soit accidentel. Justine passa ensuite le bras sous le sien et posa la tête sur son épaule avant de la diriger vers la sortie.

Aux portes de la nef, Justine dut la lâcher pour se mêler à la foule. Astrid lui donna une petite tape d’encouragement sur la fesse avant de la laisser partir. Son amie, tout comme sa famille, se montrait forte, mais Astrid se doutait que ses nerfs auraient raison d’elle à leur retour chez elles.

Astrid entendit le croque-mort dire à la veuve que le cercueil serait prêt à être mis en terre dans une demi-heure et lui demander de patienter pour débuter le cortège. Se retrouvant seule, Astrid s’approcha du livret mis à disposition pour laisser un message à la famille et lut quelques lignes. En se penchant en avant, elle sentit sa jupe crayon se resserrer en haut de ses cuisses et à sa taille, ce qui la fit sourire à l’idée de la marque désormais visible de ses sous-vêtements. Un coup d’œil par-dessus son épaule lui confirma que les yeux de Benoît étaient attirés par la vue qu’elle offrait. Forte de ce constat, elle changea de jambe d’appui, faisant rouler ses hanches lentement. Un autre regard volé lui révéla que le jeune homme avait abandonné son audience pour la rejoindre. Astrid se redressa et fit mine d’avancer vers la sortie. En deux enjambées, Benoît la rejoignit et posa une main au creux de ses reins. Comme seul encouragement, Astrid lui offrit un sourire plein de promesses lorsqu’ils atteignirent le parvis.

Benoît la guida pour contourner l’église. Alors qu’elle se faisait entraîner, en silence, à l’arrière de l’édifice, Astrid s’apprêtait à râler, mais Benoît se tourna pour lui attraper la main et l’attirer dans un baiser passionné. Elle eut à peine le temps de réaliser qu’il posait les lèvres sur les siennes que déjà sa langue s’invitait dans la partie. Trop heureuse d’enfin en arriver aux choses sérieuses, Astrid y répondit avec ardeur, glissant les doigts sous la chemise de son compagnon. La peau moite de ce dernier l’excita encore un peu plus. Les circonstances auraient voulu qu’elle ressente au moins un soupçon de se culpabilité, mais Benoît agissait comme si cela lui était vital et elle n’avait pas l’intention de le priver de ce réconfort. Le côté animal de cette étreinte la faisait réagir de façon positive.

Benoît la fit tourner et la plaqua dos au mur contre la chapelle. A ce moment, Astrid réalisa que sa plainte de semi-douleur s’était perdue, même à ses propres oreilles. Le glas sonnait pour honorer la mémoire d’un homme parti trop tôt. Astrid en profita pour gémir à l’envi. Toujours en embrassant Benoît, elle passa la main entre eux pour frotter de sa paume l’érection grandissante. Malgré le pantalon qui entravait ses mouvements, le jeune homme y répondit en se pressant davantage contre elle et en venant lui-même jouer sur sa poitrine. Les pincements sur ses tétons étaient presque désagréables avec le tissu de son soutien-gorge qui semblait enflammer la zone et, bien qu’elle tente de s’y soustraire, Benoît continua cette caresse. En temps normal, ses amants comprenaient qu’une telle réaction était un signe d’inconfort, néanmoins Benoît choisit de l’ignorer. Astrid comprit alors qu’il se délectait de sa douce torture et qu’il lui infligeait cette légère douleur en réponse à sa propre frustration. L’attitude provocante d’Astrid un peu plus tôt ne jouait pas en sa faveur et elle ne pouvait nier tirer un quelconque plaisir d’être ainsi molestée. Astrid cessa donc de se débattre, acceptant cette punition, pas si déplaisante au final.

Aussitôt qu’elle se laissa aller sous les caresses de Benoît, celui-ci se détacha d’elle et plongea la main dans la poche arrière de son pantalon. Astrid eut un nouveau sourire en le voyant en sortir un préservatif. Elle aussi en avait un dans son sac, mais la prévoyance de Benoît pour ces obsèques le rendait encore plus attirant.

Il la fit se retourner. Maintenant ses mamelons tendus frottaient le crépi de l’église et Astrid était heureuse d’avoir ses vêtements en guise de rempart. Sa jupe étant trop ajustée au niveau des genoux pour être relevée, Benoît en ouvrit la fermeture-éclair et l’abaissa avec sa culotte juste sous ses fesses. Astrid ressentit la fraîcheur de l’air sur sa peau. La température était pourtant élevée, mais son corps était en feu. Les vêtements gainés sur ses cuisses, Astrid ne pouvait pas trop écarter les jambes, mais se cambra pour faciliter la pénétration. A peine avait-elle offert sa croupe que le sexe de son compagnon plongea en elle. Il s’enfonça jusqu’à la garde en un mouvement ample ; Astrid était si mouillée qu’elle en éprouva un bref moment de gêne. Vite oublié quand le tissu léger du pantalon de ville frotta sur ses fesses.

Benoît adopta un rythme rapide dès le début. Au lieu de son bassin, c’était sa ceinture qui claquait les fesses d’Astrid à chaque contact : elle songea qu’elle aurait certainement la peau rouge quand il en aurait fini et qu’elle risquait de grimacer les prochaines fois qu’elle s’assiérait. Toutefois, elle s’en fichait, le plaisir d’être enfin soulagée surpassait ces petits désagréments. Ou peut-être que ceux-ci augmentaient sa satisfaction. S’ils étaient amenés à se revoir, elle pourrait peut-être proposer des jeux plus pimentés à Benoît ; il avait plutôt l’air d’apprécier de la voir si soumise à ses désirs. Et silencieuse puisqu’ils n’avaient pas échangé une parole depuis leur conversation avant la cérémonie. Elle s’imaginait bâillonnée quand Benoît raffermit sa prise sur ses hanches et se mit à la pilonner un peu plus fort. Comme cela arrivait trop rarement pour une première jouissance, elle la sentit monter sans autre stimulation. Elle était persuadée qu’en jouant avec son clitoris, elle pourrait avoir un orgasme mémorable, mais elle n’aurait pas la force d’encaisser les coups de reins furieux de son amant en n’ayant qu’un bras et sa pochette pour la protéger des griffures du mur.

Un ralentissement soudain lui arracha une plainte, mais la pression plus lente et appuyée contre ses parois achevèrent de la faire jouir. Benoît cessa un moment tout mouvement, laissant la vague passer et, quand il la sentit se détendre, reprit sa cadence infernale. Astrid était haletante, le plaisir avait atteint son apogée, mais ne redescendait pas. Son amant la maintint ainsi encore quelques instants avant de succomber à son tour. Sentir éjaculer un homme en elle après un orgasme avait toujours un effet apaisant, comme s’il sifflait la fin de l’acte et l’autorisait à savourer un repos bien mérité. C’était encore plus vrai aujourd’hui ; elle avait la tête qui tournait légèrement et peinait à retrouver son souffle. À peine consciente, elle réalisa que Benoît la rhabillait et refermait son propre pantalon, glissant le préservatif usagé dans sa poche. Il la força à se retourner vers lui et l’enlaça, déposant de courts baisers dans ses cheveux. Astrid se blottit contre lui, souriant de la tendresse insoupçonnée dont il faisait preuve après leur étreinte sauvage. Ils restèrent ainsi quelques minutes, profitant de leur isolement.

Quand ils firent le tour de l’église et revinrent sur le parvis, la foule s’était dispersée. Il ne restait plus que la famille proche et l’un des membres des pompes funèbres pour guider le cortège. Justine lui jeta un regard suspicieux, mais Astrid se contenta de lui adresser un clin d’œil. Le soupir désabusé de son amie la fit sourire et lui confirma qu’elle ne lui en tiendrait pas rigueur. En revanche, Astrid regretta un instant de s’être laissé emporter avant la mise en terre et la cérémonie au cimetière. Sa petite culotte poisseuse lui rappelait qu’une douche serait des plus agréables. Sa seule consolation était que Benoît aussi allait mariner dans ses sous-vêtements.

Un instant volé avec toi

Autrice : Magena Suret.

Genres : Érotique, M/F, hot.

Résumé : Des vacances frustrantes, un site touristique à la vue surprenante, un couple qui se retrouve en pleine nature.

Note : Seconde variation d’une courte nouvelle écrite en 2014 et publiée à l’occasion du Ray’s Day 2016.

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Première variationDeuxième variation

Un instant volé avec toi

Partir en vacances entre amis était chaque année la même aventure. Ils redevenaient un peu adolescents, accueillant à bras ouverts les nouveaux venus qui agrandissaient le groupe. Bientôt, songea Emma, les premiers bébés seraient de la partie aussi. En attendant, la villa louée pour deux semaines en été prenait des allures de colonie. Chacun s’était vu attribué une tâche dès son arrivée et l’ordre régnait tant bien que mal dans la maisonnée. Il y avait bien eu quelques disputes, mais tout se réglait vite et la bonne ambiance reprenait ses droits.

Au bout de cinq jours, Emma ne trouvait à cet arrangement qu’un défaut. Mais de taille. L’abstinence forcée à cause de cette promiscuité en était devenue ridicule. Ce n’était pas comme si vivre en cohabitation devait priver de toute intimité, mais chacune de leurs tentatives s’était soldée par un échec. Benoît le prenait avec philosophie, promettant de rattraper le retard dès qu’ils retrouveraient la solitude de leur appartement. Toutefois, Emma refusait de patienter encore dix jours. Après tout, l’été était normalement l’occasion de se lâcher. Et, jusqu’à cette année, ça n’avait jamais été un problème. Sans la contrainte du travail et de leurs autres obligations, ils auraient dû pouvoir s’envoyer en l’air dès qu’ils en avaient l’envie. Au lieu de ça, ils avaient hérité d’un lit grinçant, de murs si fins qu’on entendait une conversation trois pièces plus loin et d’une seule salle de bains pour dix adultes. Autant dire que le temps passé sous la douche était minuté. Et sans parler du partage des voitures. Rien n’aidait pour leur offrir une opportunité. Elle se rendait bien compte qu’elle perdait en plus en spontanéité ; sa seule obsession était d’avoir un moment privilégié avec Benoît. Qu’il adore son corps et qu’il la fasse jouir. Elle aurait pu se masturber pour soulager ce manque, mais son côté têtu ne serait satisfait que lorsqu’elle aurait son homme nu contre elle, leurs peaux moites de plaisir.

Elle était devenue calculatrice et exploitait chaque occasion pour sauter sur Benoît. Ce dernier ne s’en plaignait pas, même si cela se terminait à chaque fois dans la frustration pour eux deux. Pour éviter d’être pressés par ceux qui attendraient, Emma avait décidé qu’ils passeraient les derniers dans la salle de bains un matin ; la douche coquine avait tourné court après quelques caresses quand ils avaient été privés d’eau chaude. Quelques heures plus tard, elle avait entraîné son compagnon dans la forêt voisine pour une balade digestive mais, alors qu’elle avait le sexe de Benoît au fond de sa gorge et ses mains lui agrippant les cheveux, ils avaient été interrompus par une famille de promeneurs. Jurant contre leur malchance, Emma avait décidé d’oublier toute retenue ou fausse pudeur : le lit ferait bien l’affaire et tant pis pour leurs amis. De toute façon, elle se doutait que certains d’entre eux devaient connaître le même désarroi. Cependant, que ce soit la nervosité accumulée ou les couinements du sommier, Benoît fut pris d’un fou rire et Emma ne put qu’abandonner pour la journée. Son compagnon lui dit qu’il s’arrangerait pour le lendemain et elle finit par s’endormir sur cette promesse.

***

La journée ne commença pas sous les meilleurs auspices. La frustration d’Emma au bout d’une semaine atteignait des sommets et la rendait irritable. Benoît semblait davantage préoccupé par l’organisation de la sortie en groupe que par l’idée d’apaiser cette tension sexuelle. De toute manière, dès qu’elle avait compris qu’ils passeraient encore des heures tous ensemble, elle avait failli claquer la porte et planter Benoît avec leurs amis. Seul un regard un peu plus appuyé de son compagnon la retint et elle décida d’attendre encore un peu pour voir ce qu’il avait concocté.

Dans la voiture, ils se retrouvèrent tassés à trois sur la banquette arrière d’une petite citadine. Emma était pressée contre la portière et à deux doigts de devenir folle à cause de la main de Benoît sur sa cuisse. Celui-ci semblait l’ignorer et la caressait du bout des doigts tout en discutant joyeusement avec le conducteur. Elle maudit un peu plus les coups du sort. S’ils n’avaient pas choisi d’aller crapahuter dans la montagne aujourd’hui, elle aurait pu troquer son pantalon contre une jupe et écarter les cuisses, juste assez pour inviter la main à la toucher plus haut. Elle se faisait du mal avec ses fantasmes et poussa un gémissement involontaire. Ceci attira l’attention de Benoît qui lui adressa un petit sourire narquois.

Peu de temps après, ils arrivèrent à destination et l’idée de grimper le sentier escarpé pour admirer une chute d’eau rebutait Emma. Elle fit semblant de perdre l’équilibre en descendant de voiture, espérant que Benoît saisirait l’opportunité. Ils pouvaient prétendre qu’elle s’était fait mal à la cheville, laisser les autres s’épuiser et se trouver un coin tranquille pour enfin profiter d’un moment à deux. Pourtant, il n’en fit rien et se contenta de l’aider à se relever. Elle sentit les mains de Benoît sur sa taille, le bout de ses doigts qui glissaient sous ses vêtements et son souffle près de l’oreille. Puis il lui murmura de cesser d’être impatiente avant de s’écarter, la laissant encore plus avide de contact.

L’ascension commença dans les rires, mais se termina dans le silence. Aucun d’eux n’était vraiment habitué à la montagne et ils auraient peut-être dû investir dans de meilleures chaussures de marche. Arrivés au point du vue, Emma écouta d’une oreille distraite l’une de leurs amies raconter la légende associée à cette cascade. Cela avait à voir avec le rocher le long duquel elle s’écoulait qui ressemblait à un poisson qui suivait la chute d’eau, d’où son nom du saut de la truite. Son peu d’attention fut anéanti par le clin d’œil de Benoît et son petit signe de tête pour l’inviter à le suivre. Elle sourit en réalisant que ses hormones la faisaient obéir comme une poupée hypnotisée et lui emboîta le pas.

Alors qu’ils progressaient dans un silence religieux depuis cinq minutes, Emma commençait à s’impatienter et s’apprêtait à râler, mais Benoît se tourna pour lui attraper la main et l’attirer dans un baiser passionné. Elle eut à peine le temps de réaliser qu’il posait les lèvres sur les siennes que déjà sa langue s’invitait dans la partie. Trop heureuse d’enfin en arriver aux choses sérieuses, Emma y répondit avec ardeur, glissant les doigts sous le T-shirt de son compagnon. La peau moite de sueur de ce dernier l’excita encore un peu plus. D’habitude, ils auraient pris le temps de se doucher, mais ils étaient dans l’urgence. Ils avaient un manque à combler et le côté animal de cette rencontre la faisait réagir de façon positive.

Benoît la fit tourner et la plaqua contre un arbre. A ce moment, Emma réalisa que sa plainte de semi-douleur s’était perdue, même à ses propres oreilles. Le bruit de la chute d’eau était plus fort maintenant qu’ils étaient à mi-hauteur de celle-ci et elle pourrait en profiter pour ne pas retenir ses gémissements. Toujours en embrassant Benoît, elle passa la main entre eux pour frotter de sa paume son érection grandissante. Malgré le pantalon qui entravait ses mouvements, son amant y répondit en se pressant davantage contre elle et en venant lui-même jouer sur sa poitrine. Les pincements sur ses tétons étaient presque désagréables avec le tissu de son soutien-gorge qui semblait enflammer la zone, mais Benoît continua cette caresse bien qu’elle tente de s’y soustraire. En temps normal, il lisait le moindre de ses gestes et s’adaptait naturellement, aussi comprit-elle que c’était sa façon de la réprimander pour toutes ces tentatives avortées qui les avaient laissés plus frustrés de jour en jour. Emma cessa alors de se débattre, acceptant cette punition pas si déplaisante au final.

Aussitôt qu’elle se laissa aller sous les caresses de Benoît, celui-ci se détacha d’elle et la fit se retourner. Maintenant, ses mamelons tendus frottaient l’écorce de l’arbre et Emma était heureuse d’avoir ses vêtements en guise de rempart. Elle entendit son compagnon ouvrir son jean et ressentit bientôt la fraîcheur de l’air sur ses fesses. La température était pourtant haute, mais son corps était en feu. Benoît lui avait tout juste baissé son pantalon et sa culotte à mi-cuisse ; elle ne pouvait pas trop écarter les jambes, mais se cambra pour faciliter la pénétration. A peine avait-elle offert sa croupe que le sexe de son compagnon plongea en elle. Il s’enfonça jusqu’à la garde en un mouvement ample, Emma était si mouillée qu’elle en éprouva un bref moment de gêne. Vite oublié quand le jean rugueux frotta sur ses fesses.

Benoît adopta un rythme rapide dès le début. Au lieu de son bassin, c’était sa ceinture qui claquait les fesses d’Emma à chaque contact et elle songea qu’elle aurait certainement la peau rouge quand il en aurait fini. Toutefois, elle s’en fichait, le plaisir d’être enfin soulagée surpassait ces petits désagréments. Ou peut-être que ceux-ci augmentaient sa satisfaction. A leur retour, elle pourrait peut-être proposer des jeux plus pimentés à Benoît ; il avait plutôt l’air d’apprécier de la voir si soumise à ses désirs. Et silencieuse puisqu’ils n’avaient pas échangé une parole depuis qu’ils étaient descendus de voiture. Elle s’imaginait bâillonnée quand Benoît raffermit sa prise sur ses hanches et se mit à la pilonner un peu plus fort. Comme cela arrivait trop rarement pour la première jouissance, elle la sentit monter sans autre stimulation. Elle était persuadée qu’en jouant avec son clitoris, elle pourrait avoir un orgasme mémorable, mais elle n’aurait pas la force d’encaisser les coups de reins furieux de son amant en n’ayant qu’un bras pour la protéger de l’écorce de l’arbre.

Un ralentissement soudain lui arracha une plainte, mais la pression plus lente et appuyée contre ses parois achevèrent de la faire jouir. Benoît cessa un moment tout mouvement, laissant la vague passer et, quand il la sentit se détendre, reprit sa cadence infernale. Emma était haletante, le plaisir avait atteint son apogée, mais ne redescendait pas. Son amant la maintint ainsi encore quelques instants avant de succomber à son tour. Le sentir éjaculer en elle après un orgasme avait toujours un effet apaisant, comme s’il sifflait la fin de l’acte et l’autorisait à savourer un repos bien mérité. C’était encore plus vrai aujourd’hui, elle avait la tête qui tournait légèrement et peinait à retrouver son souffle. Dans une semi-conscience, elle réalisa que Benoît la rhabillait et refermait son propre jean. Il la força à se retourner vers lui et l’enlaça, déposant de courts baisers dans ses cheveux. Emma se blottit contre lui, souriant de la tendresse dont il faisait preuve après leur étreinte sauvage. Ils restèrent ainsi quelques minutes, profitant de leur solitude au milieu de la nature et du murmure élevé de la cascade. Un éclat de rire la prit quand elle remarqua qu’ils étaient à la hauteur de la tête de la truite de pierre ; ils avaient eu un témoin de leurs ébats et Emma se dit qu’elle était tombée amoureuse de ce site touristique finalement. En tout cas, elle aurait toujours un souvenir agréable à y associer.

Quand ils redescendirent, quelques-uns de leurs amis leur jetèrent un regard entendu, mais elle les ignora. En revanche, elle envia ceux qui se baignaient juste auprès de la chute d’eau ; sa petite culotte poisseuse lui rappelait qu’une douche serait des plus agréables. Sa seule consolation était que Benoît aussi allait mariner dans ses sous-vêtements.